Comme je l’espérais avant de partir, les hasards du voyage nous font faire de très belles rencontres. Et comme je l’espérais également, la pandémie et le port du masque n’empêchent pas les liens. Nous avons bien fait de ne pas nous décourager de partir 🙂
À Ayacucho, Nico nous a trouvé un logement via Booking : le Hospedaje Central, à deux pas de la magnifique Plaza de Armas. Nous y sommes arrivés le 25 octobre en fin d’après-midi, complètement dans les vapes à cause du trajet en bus depuis Paracas, très difficile à cause de l’altitude. La propriétaire de l’hospedaje, qui devait avoir entre 60 et 70 ans, et l’un de ses fils nous ont gentiment accueillis et nous ont même fait un mate de coca (une infusion de feuilles de coca) pour nous remettre du voyage.
L’ambiance au Hospedaje Central était très particulière : c’était un grand bâtiment à trois étages, tout en longueur, dont les chambres du rez-de-chaussée donnaient dans une grande cour. Un jour, j’imagine, quand la propriétaire était plus jeune, ce devait être un va-et-vient de voyageurs à tous les étages. À en croire la taille de certaines pièces vides au 2e étage, il devait y avoir des dortoirs. Mais quand nous y avons logé, nous étions pratiquement les seuls voyageurs. Les autres résidents que nous croisions régulièrement dans la cour étaient des résidents permanents. Des personnes assez marginales, à part une famille avec une petite fille. Des personnes qui en tout cas n’ont pas les moyens de louer plus qu’une chambre où habiter.
La décoration des chambres était très, très chargée. Les murs étaient presque couverts de grandes reproductions de tableaux, l’évier, la toilette et le miroir étaient noirs, les meubles en bois sombre. Ça donnait une ambiance de « chic passé ».
Comme beaucoup d’autres péruviens, la propriétaire de l’hospedaje était complètement sous le charme des cheveux blonds et des yeux clairs de nos filles. Elle ne nous croisait jamais sans dire : « Ai que lindas! Hermosas! Se parecen como muñequitas! » (Ah qu’elles sont jolies ! Qu’elles sont belles ! On dirait des poupées !) Elle habitait, avec au moins un de ses fils, une aile du bâtiment perpendiculaire à celle des chambres. Juste en face de nos deux chambres, il y avait un très joli mini jardinet avec un grand évier où elle et les autres résidentes faisaient leur vaisselle et leur lessive. Il y avait aussi, au plus grand bonheur de nos filles, une grande cage avec des cuys (des chochons d’Inde).
Nous avons beaucoup aimé loger à cet endroit, côtoyer un petit bout de Pérou authentique et faire la connaissance de personnes extrêmement chaleureuses. La famille qui habitait au rez-de-chaussée au bout de la cour se composait d’une maman, Violeta, une petite fille, Maia (5,5 ans) et une grand-mère. Il y avait peut-être aussi un papa, mais nous ne l’avons jamais vu. Elles vivaient toutes les trois dans une seule pièce faisant environ 7m sur 3,5m, soit moins de 25m². Dans la pièce, il y avait un canapé, une table de jardin, des chaises en plastique blanc et plus loin deux lits doubles côte à côte. Il y avait aussi quelques étagères et beaucoup de jouets, au grand plaisir de Margaux. Violeta était super accueillante. J’ai beaucoup aimé discuter avec elle pendant que Margaux et Maia jouaient ensemble sur un des lits.
Le 31 octobre, nous avons quitté Ayacucho et pris un mini bus vers Andahuaylas. Un trajet aux paysages époustouflants, passant par des hauts plateaux, puis descendant des pentes très raides en lacets interminables jusqu’à une large vallée fluviale presque tropicale. Il y faisait mourant de chaud. Puis une remontée vers d’autres hauteurs, très différentes mais tout aussi belles que les précédentes. Heureusement, nous avions bien, bien pris les devants cette fois-ci : complément alimentaire à la coca avant de partir, caramels de coca pendant le voyage et feuilles de coca à mâcher pour les adultes. Ce qui fait qu’en moyenne, on a beaucoup mieux vécu ce trajet-ci que le précédent.
Un peu groggys de 5h de bus sans pause, nous avons débarqué vers 16h30 chez Elena et Carlos dans le centre d’Andahuaylas. J’avais trouvé leurs coordonnées sur Airbnb. Elena nous a accueillis avec un large sourire et en… français ! Quel bonheur, le hasard des rencontres ! Elena et Carlos ont vécu cinq ans en Belgique (de 1987 à 1992), où ils ont fait chacun une maîtrise. Ils vivaient avec leurs deux enfants à Woluwe sur le site de l’UCL. Ils connaissent très bien Louvain-la-Neuve, le shopping de Woluwe, Stockel, la piscine du Poseidon… Que de choses nous avons en commun !
Nous louons chez eux une petite maison qui se trouve dans leur jardin, à l’intérieur du pâté de maisons. C’est comme une oasis, un havre de paix en pleine ville. Nous avons trois chambres avec chacune une salle de bain, une petite cuisine et un jardin ! Quel plaisir de cuisiner nos propres repas ! De profiter du jardin, de manger dehors, de se reposer. Dès le lendemain de notre arrivée, Elena et Carlos nous ont invités au petit déjeuner chez eux avec leur famille. C’était le 1er novembre, la fête du Wawa. Wawa veut dire bébé en quechua. Lors de cette fête, la famille se rassemble pour le petit déjeuner. On mange du cochon de lait et des wawa, des pains qui ressemblent très fort à des cougnous, décorés de sucreries. Pour les femmes, il y a des wawa en forme de bébés et pour les hommes en forme de chevaux. Après le petit déjeuner, on a discuté et joué au jeu du sapo (du crapaud) dans le jardin. C’est un très chouette jeu auquel on avait déjà joué à Apu Ecolodge à Caraz et qu’on s’est promis d’acheter pour chez nous en Belgique.
Hier après-midi, la sœur de Carlos, Vicky, est venue montrer aux filles comment fabriquer une marionnette. Elle est enseignante et adore les enfants. Le soir, Elena et Carlos nous ont invités à rejoindre la famille élargie dans un magnifique restaurant sur la Plaza de Armas pour un lonche, l’équivalent du goûter chez nous, à la mémoire du papa de Carlos. On a goûté pour la première fois du ponche de almendras, une boisson chaude à base d’amandes dans laquelle on rajoute du pisco, une eau-de-vie de vin. Succulent ! Le ponche était accompagné d’une roulade au fromage et de gâteau.
Et aujourd’hui, nous sommes allés nager avec Elena et Carlos à la toute nouvelle piscine de San Jerónimo, juste à côté d’Andahuaylas. Dans le jardin devant la piscine, nous avons tous fait de la tirolienne, après quoi ils nous ont invités chez eux à manger une soupe maison, pleine de légumes (Steph contente !) et du chicharrón de chancho. Le repas était accompagné de chicha de jora, la boisson des incas. Trèèèès bon !
Quel plaisir d’être accueillis dans le quotidien d’une famille péruvienne ! De partager des repas, d’échanger, de discuter Belgique et Pérou. Nous partons demain matin pour Abancay, point de départ pour le trek vers Choquequirao. Nous nous réjouissons déjà d’accueillir Elena et Carlos chez nous la prochaine fois qu’ils viendront en Belgique. Ah oui, parce que le frère de Carlos et un cousin d’Elena vivent en Belgique !