La grande île au sud de laquelle se situe Ushuaïa est partagée entre le Chili et l’Argentine. Différentes histoires existent pour expliquer son nom, « Tierra del Fuego », Terre de Feu. Voici celle que je préfère. Les Yagans, le peuple qui habitait, avant l’arrivée des européens, le sud de la Terre de Feu et l’autre côté du canal Beagle jusqu’au Cap Horn, se déplaçaient et chassaient dans des canoës faits d’écorce de lenga. Comme les températures pouvaient descendre proche de zéro même en été, ils transportaient toujours avec eux, dans leurs canoës, du feu. Tandis que les femmes pagayaient à l’arrière et que les hommes se postaient à l’avant du canoë pour chasser avec leur harpon, les enfants avaient la tâche de maintenir vivant le feu, au milieu de l’embarcation. Les Yagans ne se déplaçaient jamais sans le feu. Voyant cela, les premiers européens arrivés ici ont surnommé la région la Terre de Feu.
Nous sommes allés marcher trois fois dans le Parque Nacional Tierra del Fuego, la réserve naturelle située juste à l’ouest d’Ushuaïa, au bout d’une piste de terre, la fin de la Route Nationale 3. Là-bas, forêts de lenga pleines de drôles de champignons oranges, lacs et rivières, chevaux sauvages, sous-bois tapissés d’orchidées « Palomita » (petit clin d’œil à Selene, Olivier et el Taco Mobil), buissons de calafate (de petites baies noires comestibles) et des tonnes d’oiseaux. Des paysages à couper le souffle, vous jugerez vous-mêmes en découvrant les photos. Ce qu’on raconte ici, à propos des baies de calafate, c’est que « Come calafate y seguro que volverás. » (Mange une baie de calafate et c’est certain que tu reviendras en Terre de Feu). On s’est empressés d’en manger ! C’est un peu sur, mais pas mauvais. Et puis, vous le savez déjà, on y a vu une baleine !
Vers l’est, nous avons pris une autre piste de terre vers Puerto Almanza, un tout petit port où nous avons goûté pour la première fois du centolla (prononcé « sentoïa » en espagnol « normal », mais « sentocha » par les argentins), du crabe royal de Patagonie. Puerto Almanza est juste à côté d’Ushuaïa… à 80 kilomètres ! Les distances sont énormes ici. La piste de terre nous a emmenés dans des forêts de lenga, des sous-bois tapissés de boutons d’or, des paysages plus nus avec des arbres penchés tellement ils font face à des vents forts. Un peu partout le long des rivières, on voit des centaines d’arbres morts. Ils ont été noyés par les castors qui inondent de larges zones avec leurs barrages. Ces animaux d’Amérique du Nord ont été introduits par l’homme. Malheureusement, ils prolifèrent en Terre de Feu et posent beaucoup de problèmes car ils n’y ont pas d’ennemis naturels. Nico est revenu plus tard dans le même coin pour faire une rando sportive, seul, jusqu’à la Laguna Esmeralda, qui porte bien son nom.
Pour découvrir le nord d’Ushuaïa, nous sommes partis à pied de la chaleureuse petite maison que nous louions à Griselda et son mari Raul (prononcez Raoul). En quelques centaines de mètres à peine, nous nous trouvions dans la forêt. Nous sommes montés jusqu’en haut d’une colline depuis laquelle nous avions une vue imprenable sur toute la baie d’Ushuaïa. Les enfants étant fatiguées de la longue marche, Nico a poussé seul un peu plus loin et plus haut vers la « Laguna Margot » 😉 Nous avons eu droit pendant cette petite randonnée à… de la neige !!! De jolis flocons, qui évidemment ne tenaient pas longtemps sur le sol. Lucie était folle de joie.
Et au sud ? Au sud d’Ushuaïa passe le canal Beagle, un canal naturel qui relie l’océan Atlantique à l’océan Pacifique. Nous avons pris un bateau pour en découvrir une petite partie. Ce fut une plongée dans les couleurs incroyables du ciel, de la mer et des montagnes environnantes. Nous avons vu des lions de mer, des pétrels géants, des cormorans impériaux. Et nous avons fait un petit tour à pied sur l’une des îles non habitées du canal pour y découvrir une végétation rase très particulière.