Un réveil plutôt fort joyeux
Ce matin, un réveil beaucoup plus agréable qu’hier : de la musique en rue ! Une chouette musique entraînante avec de la trompette. Je me suis réveillée petit à petit. À un moment, j’ai eu envie d’aller regarder par la fenêtre. Nous logeons au cinquième étage. Notre chambre à Nico et moi donne sur une rue très animée et vivante, dès tôt le matin et jusque tard le soir. À toute heure, il y a des vendeuses (surtout) et quelques vendeurs de fruits, de vêtements, de boissons, qui envahissent tous les trottoirs ; il y a des dizaines de piétons, des collectivos, des taxis. J’adore l’ambiance de notre rue et de La Paz en général !
Je me suis donc levée pour regarder par la fenêtre. Il y avait un groupe de quatre mariachis, avec leur grand chapeau mexicain et leurs pantalons décorés de métal sur le côté. L’un jouait du violon, l’autre de la trompette, le troisième de la guitare et le dernier de la vihuela (une sorte de petite guitare). Ils chantaient aussi.
Si vous ne connaissez pas la musique des mariachis et que vous voulez avoir une idée du style, c’est par ici pour un exemple. Au Mexique, on peut payer des mariachis pour jouer lors de fêtes ou pour aller chanter sous la fenêtre de son amoureux·se. Moi, j’adore !
Bonne fête maman !
Quelle chance j’ai eue, grâce au voyage ! En Argentine, les mamans se fêtaient le 8 mai, comme en Belgique, mais ici en Bolivie, c’était aujourd’hui, le 27 mai ! J’ai donc été fêtée deux fois ! Youpiiiie !!!
Après le petit déjeuner, les filles m’ont invitée dans leur chambre. Elles avaient caché des cadeaux un peu partout : des dessins, des petits mots et une boîte de chocolats en forme de cœur.
En Bolivie, el dia de la madre est une fête d’une grande importance ! Je pense que les mariachis, c’était pour les mamans, de la part de l’association des commerçants de la rue ou je ne sais qui d’autre. Je suis allée chercher nos louloutes dans leur chambre (qui est à l’arrière de l’hôtel) pour qu’elles voient et entendent aussi. Ensemble, on a écouté les mariachis et observé la rue qui bruissait de vie. Lucie a remarqué une mamita avec un sac de confettis roses pâles à la main. Elle versait des confettis sur la tête de chaque mamita qui tenait une petite échoppe et les serrait dans ses bras. Probablement aussi une manière (très sympa je trouve) de féliciter les mamans en ce jour spécial.
Le jour de la fête des mères, les rues sont envahies de petits stands vendant des ballons, des fleurs, des pralines, du parfum, des bijoux. Partout on croise des gens de tous âges ayant acheté une surprise pour leur maman.
Il y a aussi des stands publicitaires qui profitent de l’occasion. Une marque de téléphones m’a offert une rose rouge et un chocolat. Un parti politique m’a offert un autre chocolat et une invitation à une fête en l’honneur des mamans.
Migraciones
Après le petit déjeuner, nous sommes sortis pour aller faire cacheter nos passeports à Migraciones (voir cet article-ci). Il nous fallait descendre jusque près du Prado, environ 2 km. Tous les cinq, on adore marcher dans La Paz ! Il y a des gens partout, tout le temps, et mille choses à voir. Je me dis que les Bolivien·ne·s qui débarquent dans nos villes doivent les trouver horriblement tristes et vides.
On avait pris de quoi boire et manger et les filles avaient chacune leur sac à dos avec des choses à faire, car l’administration, ça peut durer longtemps ! Arrivés à Migraciones, il faut d’abord s’enregistrer. On reçoit alors un numéro de passage. Dans la grande salle d’attente pleine de gens, il y a des écrans. À son tour, chaque personne est appelée à l’un des 17 guichets. En attendant, Éline et Lucie ont décidé de coudre l’un de leurs écussons sur leur sac à dos (Dans les endroits qui nous marquent, nous achetons des écussons-souvenir à coudre sur nos sacs à dos). Nico a joué au prof de couture pendant qu’à la rangée de sièges derrière eux, je jouais à bataille (le jeu de cartes) avec Margaux. On a eu une bataille entre deux as, vous imaginez ? On était tous tellement bien occupés qu’on a été déçus d’être appelés si vite. La dame au guichet numéro 1 nous a fait nos cachets en quelques minutes, sans même demander à voir les enfants. Ce qui fait qu’en une demi-heure à peine, tout était réglé.
Atelier couture
Comme on était dans le centre et qu’il n’était pas loin de midi, Nico a eu l’idée de rester là, de trouver un endroit sympa en rue où s’installer pour qu’Éline et Lucie puissent terminer de coudre leurs écussons sur leurs sacs. C’était très sympa : on s’est assis dans des escaliers le long d’une ligne de téléphérique. Il y avait quatre ados (deux filles et deux garçons) qui s’exerçaient pour des danses traditionnelles, donc on a même eu droit à un petit spectacle !
Food court
Vous connaissez les « food court » américains ? Ces grands espaces avec tables et chaises autour desquels sont installés différents « restaurants » : pizzeria, sushis, wok, fast food… En français, pourrait traduire par « aire de restauration ». On commande ce qu’on veut manger à l’un des restos puis on s’assied à une table. L’avantage, c’est que l’un peut prendre une pizza alors qu’un autre prend un wok ou des sushis. Je ne pense pas que ça existe en Belgique. Ici oui. Après avoir terminé de coudre les écussons, nous sommes allés manger dans un endroit pareil.
Ce fut une sacrée plongée dans l’ambiance à la bolivienne ! Pour la fête des mères, il y avait un orchestre qui jouait en live des chansons tant boliviennes qu’internationales (Abba par exemple). Mais le volume sonore était tellement fort qu’on devait crier pour se comprendre. Lucie et Margaux m’ont demandé si on n’allait pas devenir sourds. « Non, ne t’inquiète pas ! »
Décorations « fait main »
L’aire de restauration était décorée pour la fête des mères : grands rubans rouges au plafond, ballons, coeurs et silhouettes de mamans sur les colonnes et sur chaque table ! Ce qui me frappe ici en Amérique du Sud, dans les quatre pays où nous sommes déjà allés, c’est le fait que les décorations sont souvent faites à la main. C’était le cas ici dans l’aire de restauration, mais c’est le cas aussi, par exemple, pour les décos de Noël dans les magasins, dans les banques, à la Poste… Idem pour les décos de Pâques, Saint Valentin, Halloween.
Je pense que chez nous, si un·e commerçant·e décorait son magasin avec des décorations faites main, les gens trouveraient ça « cheap », « bon marché », « radin ». C’est fou ce qu’on vit dans une société qui attend de nous qu’on achète tout « tout fait ». Moi j’apprécie beaucoup les décorations faites main. Je pense à celles ou ceux qui y ont mis du cœur et du temps et ça me touche.
La pauvreté
J’adore La Paz, mais je ne peux vous en parler de manière complète sans parler de la pauvreté qui y est omniprésente, comme dans toutes les grandes villes d’ailleurs. Chaque mendiant·e me fend le cœur. Et je crois que je pourrais vivre ici pendant dix ans, jamais je ne m’y habituerais. J’aimerais donner des sous à chaque personne qui en demande, même si je sais que ce n’est pas une solution pour les sortir de leur situation. Et qu’il existe aussi la mendicité forcée.
Il y a les gens qui mendient, puis il y a celles et ceux qui vendent trois fois rien. Je n’arrive pas à comprendre comment elles et ils survivent comme ça. Je me rappelle de cette dame, accompagnée de sa petite fille. Sur un petit tapis posé devant elles, 8-10 paquets de mouchoirs. C’est tout. On ne peut pas vivre de la vente de paquets de mouchoirs à la pièce, si ?
Ou alors cette jeune fille, à la gare de bus de Sucre. Elle avait en main une trentaine de chewing gums, les longs plats emballés individuellement dans un papier. Elle passait dans la foule en criant « Chiiiiclets ! Chiclets ! Chiclets ! Chiclets ! » On peut vivre de la vente de chewing gums à la pièce ?
Au Pérou à Ayacucho, une dame vendait des petites plantes et des mini cactus. D’autres vendent quelques bonbons. Ou s’installent avec un pèse-personne. Contre une pièce, les passants peuvent se peser.
Ici à La Paz, un jeune femme avait dessiné en très grand, à la craie, un manga sur le sol d’une place. Je me souviens que quand j’étais petite, il y avait toujours des dessins comme ça dans la rue Neuve à Bruxelles. Dans ma tête d’enfant, ils faisaient ça juste pour décorer la ville. Cette jeune femme donc avait déposé des boîtes aux quatre coins de son dessin avec un écriteau : « Je ne dessine pas bien, mais je dois nourrir mon enfant. » (« mi wawa » en quechua) Elle avait, en effet, un petit enfant dans une poussette.
Je les vois, ces gens-là. Je ne peux pas ne pas les voir. Ils existent autant que les plus beaux et les plus riches. J’aimerais tant acheter leurs paquets de mouchoirs, leurs chiclets, leurs bonbons, même si je n’aime pas les bonbons. Je me pèserais bien dix fois par jour et j’achèterais des mini cactus dont je ne saurais que faire après.
Parfois je leur donne une pièce, mais je ne peux pas le faire pour tous. Alors quand je ne leur donne rien, je leur souris, pour leur dire qu’ils ne sont pas transparents et que je les ai vus.
L’égalité des sexes ?!
Ici en Bolivie, mais également dans les autres pays que nous avons visités, j’ai l’impression que sous certains aspects l’égalité des sexes est plus avancée que chez nous. Je dis bien « sous certains aspects », car il y a encore beaucoup de machisme aussi.
Le premier aspect auquel je pense, c’est le foot. Chez nous, c’est un sport masculin à l’extrême. Même s’il existe des clubs féminins, je n’ai jamais vu des filles et des garçons ou des femmes et des hommes jouer au foot ensemble. Nos filles nous disent qu’à l’école, les garçons ne veulent pas laisser les filles jouer avec eux. « Le foot, c’est pas pour les filles ! » Ici, en Amérique du Sud, on a souvent vu des filles et des garçons jouer ensemble. Pas dans le contexte d’un club, mais en rue, sur un terrain communal, dans des écoles, oui.
Le deuxième exemple auquel je pense, c’est la danse des ados qui s’exerçaient en rue ici à La Paz. Deux garçons et deux filles. Chez nous, la danse est quasi exclusivement investie par les filles. J’ai du mal à imaginer, dans un collège en Belgique, des ados des deux sexes mettre sur pied une chorégraphie ensemble. Mais je serais très contente d’apprendre que ça se fait !